Prim'... vert ... galant ...
Je porte le joli nom d’Hector et adore l’aventure,
l’inédit, les surprises … enfin tout ce qui sort de la routine
quotidienne !... Aussi, le jour où
je découvris au détour d’un virage un vieux moulin paraissant abandonné, je restai
à l’arrêt, la truffe frémissante, les oreilles dressées, le cerveau en
alerte !...
Je reconnais être un peu froussard malgré ma curiosité naturelle, aussi j’attendis le cœur battant d’autres signes avant-coureurs d’étonnement dans cette atmosphère inquiétante …
Un rayon de soleil traversait l’unique fenêtre sans
vitres pour aller réchauffer une pendule bancale appuyée sur une chaise en bois
vermoulu ! Donc, rien de bien intéressant !... Après un regard
circulaire j’allai faire demi-tour mais pensai soudain que je ratais peut-être
une proie facile au milieu du fatras entrevu ! Alors je décidai d’entrer
un peu plus avant …
Et là,
quelle ne fût pas ma surprise de découvrir derrière la pendule muette depuis
fort longtemps, dans l’encoignure d’un mur poussiéreux, une biche et son faon
nouvellement né ! Celui-ci, attendrissant, s’appliquait à se tenir debout,
tandis que sa mère le léchait avec vigueur …
Interloqué, je reconnais l’avoir trouvée très belle,
parée de couleurs rousses et lumineuses, dans son rôle de mère protectrice …
Songeur autant que ravi, j’aurais aimé
la complimenter ou du moins échanger avec elle quelques propos dignes d’un gentilhomme
courtois et admiratif, et me demandai de quelle façon procéder pour le lui
faire savoir …
Nous n’étions pas de la même race et si la communication
semblait difficile, je savais son espèce prête à l’écoute d’individus sans
agressivité ! Il n’était pas question de l’effrayer en entonnant quelque
rengaine à la mode qu’elle n’aurait certainement pas comprise car la nature
m’avait doté d’une voix cassée, gutturale, désagréable pour les oreilles non
initiées ! …
Alors une idée géniale me traversa l’esprit … Une idée
romantique à souhait qu’elle ne pourrait qu’apprécier … Doucement je ressortis
du moulin … Près de la rivière enjambée par le pont j’avais remarqué les
premières primevères de la saison … Dès que je fus dehors, je pris mon pas de
course et les atteignis sans difficulté ! J’ai beau manquer parfois
d’à-propos, et même de tenue m’a-t-on laissé entendre, je sais rester
attentionné et galant lorsque les circonstances le réclament !
C’est donc sans hésiter que je griffais la terre
humide pour en sortir le plus beau plan de ces fleurs printanières … La terre
crissait bien un peu entre mes mâchoires serrées, mais je n’eus aucune
difficulté à revenir vers le moulin et déposer aux pieds de la belle mon cadeau
éclatant fraîchement « cueilli » !...
Surprise, elle se redressa
en m’octroyant un clin d’œil que je jugeais amical et même aguichant … Inutile
de vous préciser que mon cœur de gentilhomme canin fît un bond vers les
étoiles…
desquelles je redescendis aussitôt avec émotion !...
Aujourd’hui, j’en suis encore tout retourné et
reconnaissant envers les caprices du
destin qui a profité d’une occasion exceptionnelle pour me donner cette
amitié rare et parfaite … En effet, depuis nous restons en excellents rapports
et nous rencontrons souvent pour des balades au clair de lune tandis que son
faon, devenu très turbulent je dois le dire, court après les papillons de
nuit !
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