Infortune


Acrylique


        Sans nous connaître vraiment, nous nous étions croisés, regardés timidement de loin, côtoyés dans les profondeurs de la brume…


        Quand la nuit s’éloigne, chassée par le jour naissant, tout l’univers reprend forme et, à l’aube de ce matin-là, j’ai pensé que j’étais béni des dieux !


         
Acrylique
        Sous le sycomore, je la vis se lever, lisser son teint de jeune fille et avancer d’un pas tranquille avant de disparaître dans les hautes fougères environnantes … En silence, je profitai de miettes d’ombre posées çà et là pour la suivre dans le plus grand secret, redoutant de l’effaroucher !


        Je le pressentais, mon destin allait se jouer ici même, je ne devais pas perdre un instant…


        Dans un léger froissement d’ailes, évoluant sur les craquelures du sol asséché, je me sentais capable de la suivre jusqu’au fond du fleuve vers une Atlantide imaginaire !

        Au fond du ciel pastel une main aveugle semblait traîner quelques gros nuages en forme de cylindres ou de vieux boucliers pour couvrir mon parcours confiant et, dans l’émotion du moment, je les transformai en trois anges gracieux planant au-dessus des tuiles du petit pavillon de chasse…

        Le décor était planté et je me réservais le droit d’aborder ma belle sans détours, même si je m’interrogeais sur le bien-fondé de cette rencontre qui me faisait rêver…
Mais, le bel âge n’était-il pas maintenant ?… Il était temps, avant la mort, de changer le cours des choses, de préparer un avenir à deux et c’était elle que j’avais choisie !
Sûr de mon fait, comme si un songe devenait réalité, je me précipitai sous les branchages, ne pouvant attendre plus longtemps !…


Acrylique


        Elle me guettait, l’œil attentif, son long col blanc déployé avec grâce et, avec la majesté que je lui connaissais, se détourna langoureusement, étendit ses longs bras d’une blancheur laiteuse dont l’envergure me donna des frissons, pointa le bec vers le firmament, et sans souci de mes avances, prît son envol en ricanant !…


        Interloqué, mon regard désespéré la perdît de vue après le haut du pont tandis que je ne pouvais retenir des larmes de désespoir !…
Toute la journée je restai là, anéanti, désabusé, le visage tuméfié… Ce n’est que vers minuit que je pris le chemin du retour vers un avenir désolé…


        Et pourtant, j’y avais cru !…


        Je me nomme Adam, elle s’appelle Ève… Nous sommes deux cygnes habitant la même contrée … Comment peut-on se tromper ainsi sur le déroulement d’une histoire qui fonctionne depuis des siècles pour tant d’autres… Serait-ce parce que j’avais oublié la pomme ?


Acrylique




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