Une maison particulière...

       Au cœur d’un océan de verdure la maison semblait dormir… Son toit pointu perché sur une façade à colombages attirait le regard. Au nord, le côté ombragé était romantique à souhait ; côté soleil la maison s’élevait sur deux étages ! Le mystère planait sur cette construction inhabituelle… Pourtant, ce matin, les fenêtres ouvertes laissaient envisager une présence… peut-être plusieurs !

       Qui donc pouvait être l’habitant des lieux ? Souvent, lors de mes passages dans ce quartier éloigné du centre, j’avais remarqué les volets fermés, la grille cadenassée… J’avais toujours eu l’impression de voir un manoir bâti depuis des siècles, à une époque où le châtelain faisait quelques apparitions, suivi par sa cour et, pourquoi pas, par ses pages et gentes demoiselles !

    Jugez donc de ma surprise lorsque je constatai un peu d’effervescence autour de cette bâtisse, pour moi trop souvent close, semblant renfermer un monde secret sur lequel voguait mon imagination sans limites…

      Un manoir, presque un château, sous le ciel moutonneux de cette région bourguignonne…

      Allais-je apercevoir, enfin, l’heureux propriétaire des lieux ? L’hôte qui hantait cette demeure par intermittence ? Celui qui donnait les ordres pour le nettoyage du parc, la tonte de la pelouse, la taille des buis lesquels devenaient, sous des doigts expérimentés, les sculptures verdoyantes encadrant l’allée centrale ? Celui qui avait déplacé le couvreur pour changer les tuiles coiffant la jolie petite tourelle construite au coin du perron ? Celui qui avait commandé la rénovation des façades à l'ocre si chaleureux ?… Tout annonçait une renaissance de la propriété !

      Quel plaisir ce serait de la voir revivre cette belle abandonnée depuis si longtemps !… Avec elle, le quartier allait retrouver tout son charme d’antan ! J’envisageais déjà, voguant sur la rivière qui serpentait plus bas, de nombreuses péniches accoster et débarquer son lot de jeunesse amoureuse de ces petites guinguettes posées ça et là le long de la berge…

      C’est fou comme on peut bâtir un roman au vu d’un simple changement de décor… mais il faut avouer que le décor en valait la peine !