Le jardin bleu d'Aladin
"Brume rose"
Peinture sur toile 50 x 50
Acrylique
Blotti dans son pavillon de laque, Aladin gardait jalousement son
secret. Pour y parvenir, il avait décidé de ne sortir qu'au crépuscule,
vous savez, lorsque débute ce moment "entre chien et loup" pendant
lequel la journée s'alanguit pour aller tout doucement se réfugier sous
le voile bleuté de la nuit !
Bien sûr, sa période privilégiée était celle de la pleine lune, lorsque
son jardin lui paraissait bleu sous la gorge de neige des montagnes
environnantes. Sans bruit il sortait, refermant doucement la porte
derrière lui et creusait au moyen de sa pelle magique soit au milieu des
rosiers en fleurs, soit sous le tapis des feuilles rouges d'automne ou
alors au pied du grand cèdre ou des premiers buissons printaniers ...
Tout était question de saison !
Dans ce trou, un observateur éclairé aurait été incapable de comprendre
ce qu'Aladin venait y enfouir ... Il faisait quelques signes étonnants
puis se penchait en souriant ; il chuchotait avant de se redresser en
regardant l'étoile polaire ... ensuite, il rebouchait le trou et allait
poser sa pelle près de la porte d'entrée, jusqu'au lendemain soir où il
recommençait le même stratagème ... Au loin, le pic du lion qui
dépassait tous les sommets enneigés semblait le regarder d'un air
complice ... Lui, il comprenait !
Il savait que, lors de la dernière mousson sur Hanoï, Aladin avait
perdu la plus grande partie de ses biens, il savait que son jardin bleu,
inondé, lui refusait souvent le renouveau prévu ... Alors, sous la
brume de rose, Aladin semait et cueillait les fleurs imaginaires que lui
seul voyait fleurir et, pour les garder, il les déposait au fond du
trou qu'il venait de creuser ... Il savait qu'il y aurait bien une
saison propice pour les faire renaître et les faire s'épanouir afin
qu'elles embaument son jardin si précieux ...
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